03 Août Spécial Vins Alsace 2024 – 609 vins notés par yvesbeck.wine
Vins Alsace 2024
Du 7 juillet au 21 juillet 2024 yvesbeck.wine alias Beckustator a sillonné la région alsacienne à la (re)découverte du vignoble et des domaines vinicoles.
Ces 14 jours ont permis à Yves Beck de confectionner le nouveau Magazine Spécial Alsace 2024. Ce carnet de 93 pages est disponible en téléchargement pour la modique somme de CHF. 18.00
609 vins y sont précisément décrits et notés avec des indications quant au type de terroir et quant à l’apogée.
Vous pouvez télécharger le magazine en cliquant ce lien
Bonne lecture 🙂
Les millésimes présentés s’étendent de 1983 à 2023, avec des focus sur 2020 (68 vins), 2021 (81), 2023 (92), puis une dominante de 2022 (229). Ces quatre millésimes se suivent, mais ne se ressemblent pas. Ci-après, nous nous concentrons sur les trois dernières années.
Apocalyptique ne signifie pas mauvais vins
Il est important de lire entre les lignes, de s’intéresser aux détails et de ne pas opter pour des raccourcis qui mènent vers des résultats noirs ou blancs.
Prenons pour exemple le millésime 2021. Si l’on s’en tient à son caractère apocalyptique et aux dégâts en partie liés au gel, mais surtout au mildiou, on pourrait en conclure que la qualité des vins n’est pas bonne.
Or, c’est avant tout la quantité qui est discutable, respectivement faible. La récolte, toutes AOC classées confondues, de 794 000 hl est en baisse de 25 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années (source : Insee)
Les vins blancs tirent leur épingle du jeu, et bien entendu les grands terroirs. Les acidités assurent une saine musculature qui fait office d’assurance-vie dans une logique de garde.
Pour les vins rouges, la situation est plus compliquée, car la texture n’est pas à niveau. Ce qui n’empêche pas d’avoir quelques grands vins rouges alors que l’on trouve de très grands vins blancs. Encore une fois, c’est le ratio entre les bons et les grands vins qui change, pas le fait que chaque millésime compte de grandes réussites.
Différent, mais pas moins compliqué
Dans une logique totalement différente, le millésime 2022 se profile de manière plus posée, avec à la clé des résultats bien plus enthousiasmants que 2021.
Et pourtant, le cheminement n’a pas été moins compliqué. L’hiver doux et sec a ouvert la voie à un déficit hydrique qui a fait souffrir la vigne. L’été très chaud, et également sec, n’a évidemment pas arrangé les choses en accélérant la croissance, mais en menant à des blocages de maturité et à une véraison tardive.
Ajoutons-y les épisodes de grêle qui ont touché plusieurs secteurs du vignoble alsacien et l’on comprend que ce millésime n’a pas été de tout repos pour la vigne. Les pluies de fin août et septembre ont été salvatrices. Au final, la récolte de 923 500 hl est certes supérieure à 2021 (+ 16 %), mais 5 % en dessous de la moyenne quinquennale. (Source : Insee)
L’amertume, un complice fondamental en 2022
Les vins ont des acidités plus basses qu’en 2021, mais plus de densité et de richesse. Dans cette logique, on peut donc s’attendre à moins de fraîcheur (et c’est toujours dangereux de s’attendre à des choses…). Il faut d’abord goûter, puis discuter ensuite.
C’est là que les amertumes peuvent jouer un rôle clé, car si les notes amères, en excès, peuvent avoir un effet asséchant et dur, elles sont en mesure de contribuer à la fraîcheur.
Longtemps, les amertumes étaient un sujet tabou. On n’en parlait guère ou alors négativement. Et pourtant, elles sont bienfaisantes. Outre la fraîcheur, elles appuient et étirent les finales. Le principe de base est très simple avec les amertumes : tant qu’elles ne dérangent pas, elles sont positives !
J’ai ainsi souvent goûté des 2022 très convaincants quant à la fraîcheur. En tout cas au niveau des vins blancs et malgré des analyses démontrant des acidités totales plus basses.
Le Pinot Noir s’en tire plutôt bien
Les excès de chaleur et la sécheresse ne sont pas les meilleurs alliés du Pinot. Ni de la vigne en général, mais certains cépages et certains terroirs gèrent mieux ces excès. J’ai évidemment goûté de très bons 2022, mais les Pinots alsaciens ne sont pas (encore) aussi euphoriques que certains s’affairent à prétendre (à mon humble avis, donc). À les écouter, l’Alsace est le nouvel eldorado du Pinot Noir en France. Moi, je veux bien, mais il y a encore du pain sur la planche !
Maintenant, il faut consolider
Je salue l’engouement lié aux Pinot Noirs alsaciens. Je pense toutefois qu’il est essentiel d’aligner les grandes réussites et d’avoir plus de recul avant d’entamer les roulements de tambours. Il s’agit de consolider le positionnement, de faire ses preuves. C’est un peu comme au bowling ; il ne suffit pas d’un strike pour être parmi l’élite. Il faut les cumuler et les confirmer !
Ne me mécomprenez pas. Parmi les 50 Pinots Noirs 2022 que j’ai goûtés, il y en avait d’excellents. Parfois, j’ai néanmoins été gêné par des tannins secs et durs que l’ampleur et la richesse n’étaient pas en mesure d’emballer. Certes, avec 50 vins dégustés ma vision est restreinte et j’espère sincèrement me tromper dans ma lecture.
En 2025, j’aurai certainement une interprétation plus pertinente en goûtant des 2022 avec une année de maturité en plus.
Millésime 2023
En 2023, les rendements ont repris du poil de la bête et sont entre 8 et 10 % supérieurs à 2022. Quantité et qualité sont au rendez-vous.
Sur 609 vins notés, 92 sont issus du millésime 2023. Je pense que c’est justement avec ce millésime que l’Alsace est en mesure de mettre en lumière la qualité de ses Pinots. Ce que j’ai pu goûter est non seulement réjouissant, mais également convaincant ! J’aborderai ce millésime de manière plus approfondie en 2025. J’aurai alors goûté suffisamment de vins pour tirer des conclusions et confirmer mon ressenti actuel.
La souffrance revient à la surface
Permettez-moi également une touche plus personnelle, plus émotionnelle. Moi qui côtoie quotidiennement des vignerons et des vigneronnes, des gens qui travaillent la terre, qui connaissent leurs vignes, leurs terroirs et leurs spécificités, j’ai appris à les écouter, à comprendre ce qu’ils ou elles disent (ou ne disent pas), à les aimer.
J’ai aussi ressenti les vives émotions qui refont surface lorsque l’on aborde les millésimes dits compliqués, comme 2021, par exemple. Beaucoup ont été marqués par cette année en utilisant des qualificatifs tels que « apocalyptique », « déluge » et j’en passe… Dans ce contexte, il est difficile pour les vignerons et vigneronnes de positiver un tel millésime, car tout ce qu’ils et elles ont vécu les a marqués profondément.
Et pourtant, croyez-moi, il y a de quoi être fier de 2021. Certains de ces vins seront reconnus, à juste titre, par d’autres générations, dans 20, 30 ou 40 ans. D’ici là, j’espère que suffisamment d’eau aura passé sous les ponts. Il est certes sain que l’on se souvienne du contexte compliqué, mais le plus important est qu’au final il y a des vins brillants. C’est un message d’espoir, une valeur essentielle pour les générations à venir !
Merci de l’intérêt que vous avez porté à ce billet. Vive le vin, vive le vin alsacien !
Bien à vous, Yves Beck
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