01 Oct Alsace – Le Riesling et ses douze amers
Même au-delà de l’Alsace et le Riesling, je vous voir venir, protestant face à ce texte pas très catholique. Il se veut, évidemment, polémiste !
Les Alsaciens déclarent la guerre au Riesling et ses doux amers. Mais quelle mouche les a donc piqué ?
L’ennemi, c’est la douceur
Quittons le monde des jeux de mots qui créent bien des maux. Concentrons-nous plutôt sur l’auto-but magistral que l’Alsace s’est affligé, volontairement. Que dis-je ? Ce n’est pas un auto-but c’est de l’autoflagellation !
Je vous le concède, l’entrée en matière ne révèle rien du tout. Vous comprendrez néanmoins rapidement pourquoi il s’agit de quitter le monde de la douceur pour réhabiliter le sucre !
Eh oui, il faut taper sur la table. C’est ce que Pierre Gassmann, vigneron émérite de l’élite des vignerons alsaciens, tente de faire au travers d’une pétition.
Il faut sauver le soldat Riesling
Non, ce n’est pas un nouveau film. Il s’agit du site que Pierre Gassmann a créé pour porter secours au Riesling. Ce noble cépage marque l’histoire viti-vinicole alsacienne depuis de nombreux siècles !
Extraits du texte publié par le site Il faut sauver le soldat Riesling
Interdiction d’appeler un Riesling, Riesling
« Je déplore d’apprendre de nos fournisseurs de vins d’Alsace que l’on veut interdire la diversité des Rieslings alsaciens : bientôt la mention « Riesling » serait interdite sur les étiquettes des vins contenant plus de 4 grammes de sucres par litre.
Ce projet conduira à rendre moins lisible l’étiquetage des vins issus du cépage Riesling, ce qui est un comble de notre point de vue de consommateurs, amateurs et/ou prescripteurs.
La législation européenne a déjà défini les règles
En effet, un marché existe pour ces vins « demi-secs », « moelleux », « doux ». Ils ne vont pas disparaître par enchantement et leur nouvelle modalité d’étiquetage va compliquer considérablement la lecture de l’offre. Celle-ci est pourtant facilitée par les mentions « sec », « demi-sec », « moelleux » et « doux » définis par la législation européenne.
L’élégance de ces types « demi-secs », « moelleux », « doux » de Rieslings qui exaltent pourtant leur terroir doit être défendue contre cette frénésie normative et cette standardisation nivelant l’identité et la qualité vers le bas.
C’est d’ailleurs pour préserver ces spécificités et identités originales que l’INAO a été créée. Or, ce projet trahit ce fondement et cherche à interdire plutôt que de protéger des usages pratiqués très largement.
Trois-quarts du vignoble alsacien
Ces vins issus de raisins mûrs provenant en majorité de sols calcaires, argilo-calcaires, marno-calcaires, marno-calcaro-gréseux et argileux. Ils représentent à eux seuls les trois-quarts du vignoble alsacien.
Ils sont une rareté dans le monde et confèrent à l’Alsace une particularité unique qui est reconnue et enviée aux quatre coins du monde.
Par ailleurs, nous constatons que son application stricte provoquera l’impossibilité de produire des Rieslings dans les millésimes solaires dans les meilleurs terroirs du vignoble. Et ceci en raison du réchauffement climatique.
Certains chercheurs estiment même que le riesling d’aujourd’hui est climatiquement obsolète à produire la typicité de nos aïeuls. Cette dimension est intégrée et comprise à l’international et dans les autres régions mondiales productrices de Riesling où sont bien respectées et utilisées les mentions « sec », « demi-sec », « moelleux » et « doux ». Il en va de même pour l’ensemble des concours internationaux où ce cépage est dégusté et encensé.
Ainsi, il serait insensé de laisser la porte ouverte à une concurrence faussée sur des marchés aux créneaux très porteurs pour ces Rieslings riches et d’amputer le plaisir de consommateurs qui se verraient contraints de se tourner vers les autres pays producteurs de Riesling.
Il serait également aberrant et incompréhensible de renier l’Histoire alsacienne d’un trait de plume pour contenter certains producteurs qui ne représentent pas à eux seuls, l’âme vivante du vignoble alsacien qui nous fait rêver.
L’appellation est un bien commun
Partagé entre la communauté des producteurs et celle importante des consommateurs, l’appellation est un bien commun qui ne peut être asservie à des intérêts catégoriels particuliers.
Si ce décret est maintenu et que seuls les Rieslings « secs » ont le droit d’exister dans les diverses appellations alsaciennes, l’INAO devra permettre la création de nouvelles appellations pour éviter l’interruption des usages significatifs, multiples et constants à défaut de prendre la responsabilité d’un profond Schisme en Alsace.
Cépage roi d’Alsace
Ce diktat réduira ce cépage roi à une place marginale qui sera en opposition avec son Histoire qui remonte au Moyen-Âge. Le Riesling est l’un des cépages rois d’Alsace et il est inconcevable de l’amputer de sa tête, de ses bras et de ses jambes.
A défaut d’aimer la douceur, aimons la liberté
En résumé, un domaine qui produit un Riesling contenant plus de 4 grammes de sucre par litre, n’osera plus mentionner le cépage Riesling sur l’étiquette. Une exception est faite pour les vendanges tardives et les sélection de grains nobles.
Ce n’est non seulement une aberration, c’est carrément liberticide !
Les médias et professionnels du monde du vin que je côtoie, autant en France, qu’en Allemagne, Autriche et Suisse sont abasourdis par cette décision. Une décision votée par l’interprofession alsacienne elle-même…
Le fautif n’est pas l’INAO
Il ne faut donc pas faire porter le chapeau à l’INAO qui ne se prononce pas sur le bien-fondé de la décision. Elle valide juste ce que l’interprofession a démocratiquement décidé. Donc s’il y a bien des fautifs dans cette histoire rocambolesque, ce sont les Alsaciens eux-mêmes !
A eux de corriger le tir. Le délai pour le dépôt de la pétition est le 1er octobre 2023, donc aujourd’hui. C’est aussi la raison pour laquelle je publie ce billet maintenant ; il ne faut en aucun cas lâcher la pression.
Je suis curieux du résultat de la pétition lancée début août. J’espère sincèrement que les efforts entrepris par de nombreuses personnes pour contrer cette décision seront dûment récompensés.
Il reste des solutions
Et si tel n’est pas le cas, la désobéissance collective est plus forte qu’une règle qui ne desservira aucunement l’Alsace. A mon avis, c’est bien ce qui risque d’arriver.